La thérapie philosophique

La thérapie philosophique

La philo-thérapie s’adresse à tous ceux qui se posent des questions sur le sens de la vie en général et sur le sens de leur vie en particulier ; à ceux qui ne parviennent pas à dépasser seuls les difficultés engendrées par les maux quotidiens. Cependant la philo-thérapie n’est pas conseillée aux personnes qui souffrent de pathologie psychiatrique complexe pour qui un travail de psychothérapie classique sera plus approprié.

 

 

La philosophie n’est pas réservée aux « penseurs de profession », pour reprendre les mots de Kant, mais elle a beaucoup à apporter à chacun d’entre nous quel qu’il soit, intellectuel ou non. Parce que la philosophie permet de trouver des réponses à nos maux quotidiens et qu’elle permet à chacun de donner du sens à ce qu’il vit. En cela, comme la psychothérapie, la philosophie amène à un travail sur soi et permet de découvrir une maîtrise de soi afin d’agir sur les événements. Elle permet de ne pas être balloté au gré des événements, de ne pas se laisser submerger par eux comme l’affirment les stoïciens. La philosophie est ainsi un art de vivre et de mieux vivre. Elle amène à plus de conscience de soi, plus de discernement pour devenir à la fois sujet et objet de sa recherche afin de se réconcilier avec soi-même.

Epicure prétendait que la recherche du bonheur véritable était la thérapie nécessaire à notre humanité. Aristote déclamait que « la vie bonne dans la cité » et les moyens d’accéder à ce bien suprême est le but principal de toute existence. Descartes voulait dissiper le doute et rétablir la raison en cherchant la juste mesure entre notre volonté infinie et nos possibilités finies, dans un nécessaire rappel de la condition humaine. Pour Alain, l’essentiel consistait dans un effort de conformité entre action et pensée.

 

Tous ces personnages nous apprennent à discerner le nécessaire du superflu ; c’est en effet ainsi qu’Epicure trouve la voie d’accès au bonheur : dans une vie débarrassée de l’obsession du confort matériel et des tracas liés à celui-ci qui rendent l’être humain malade. Loin d’une discipline ascétique, la philosophie cherche à enrichir l’homme par la connaissance de ce qui le constitue ; sa conscience, son âme, et la recherche d’une harmonie par l’apaisement et la sérénité lorsqu’il entrevoit la possibilité de faire enfin partie d’un tout, dans une sorte de lâcher-prise orienté et construit.

 

Platon donne une des plus emblématiques formulations de la particularité de l’âme humaine, laquelle comprend donc essentiellement « […] deux parties : l’une supérieure en qualité et l’autre inférieure ; quand la supérieure par nature commande à l’inférieure, on dit que l’homme est maître de lui-même – c’est un éloge assurément ; mais quand, par le fait d’une mauvaise éducation ou de quelque mauvaise fréquentation la partie supérieure, qui est plus petite, se trouve dominée par la masse des éléments qui composent l’inférieure, on blâme cette domination comme honteuse, et l’on dit de l’homme dans un pareil état qu’il est esclave de lui-même et déréglé. »

 

Lorsqu’on pousse plus avant la découverte philosophique, on se rend compte que la multitude de discours, tous horizons confondus, ne cherche à comprendre qu’une même chose : comment être-au-monde avec le moins de souffrances possibles ? En effet, le discours d’Epicure n’est pas sans rappeler les disciplines orientales, et bien que datant d’une époque éloignée, il nous parle avec des mots qui résonnent encore aujourd’hui tant les préoccupations humaines restent inchangées à travers le temps. Son but est également contemporain : se libérer de l’anxiété pour atteindre l’ataraxie (une forme de paix intérieure).

 

Enfin, en mettant en place ce dialogue philo-thérapeutique, nous ne faisons que suivre ce qui existe déjà depuis une vingtaine d’années aux Etats-Unis, et suit la ligne de ce que nous commençons à voir également chez nous ; à savoir un mélange qui conduit à un éclatement de certaines catégories apparemment tranchées, mais qui se rejoignent dans leur but initial : la santé de l’esprit. Pour cela nous pouvons associé la thérapie et la philosophie dans une démarche de  « thérapie situationnelle » qui aiderait à répondre au défi principal de l’époque, être capable d’agir dans la complexité. Comme Spinoza l’écrit dans son Éthique, les hommes se croient libres du fait qu’ils ignorent leurs chaînes. La tâche d’une thérapie situationnelle consiste dans la possibilité de les transformer en liens avec les autres, comme condition de la vraie liberté.

 

Concluons avec ce texte de Jean Rostand : 

Former les esprits sans les conformer, les enrichir sans les endoctriner, les armer sans les enrôler, leur communiquer une force dont ils puissent faire leur force, les séduire par le vrai pour les amener à leur propre vérité, et leur donner le meilleur de soi, sans attendre ce salaire qu’est la ressemblance. 

 

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