Un jour, le roi de Djamboûli appela son premier ministre.
– Il me vient une idée, dit-il. Ramène-moi tous les aveugles que tu trouveras par chez nous.
Ainsi fut fait. Bientôt, dans la cour du palais, furent amenés dix aveugles.
– Qu’on leur présente un éléphant, dit le roi. J’aimerais savoir comment chacun d’eux le perçoit.
On poussa le premier devant la grosse bête. Il palpa posément la trompe.
– Un éléphant, dit-il, est tout à fait semblable à une énorme corde.
Le deuxième palpa la queue.
– Mon frère, dit-il, fait erreur. L’éléphant est comme un balai.
Le troisième palpa l’oreille.
– Non, dit-il. Comme un éventail.
Le quatrième palpa les flancs.
– A mon avis, dit-il, l’éléphant est un mur.
Et comme chacun défendait furieusement son point de vue :
– Cela me suffit, dit le roi. Merci de m’avoir réjoui. Chacun cherche la vérité, en touche une part minuscule et croit l’avoir toute perçue. Nous faisons tous ainsi, mes hommes.