Se raconter, s’écouter, partager ses désirs et ses goûts… Voilà le secret d’une entente amoureuse durable. Mais pris que nous sommes par le quotidien, l’anxiété et le manque de temps, communiquer vraiment avec l’autre s’avère souvent plus facile à dire… qu’à faire. Pourtant, il est possible d’améliorer le dialogue et même, de tirer parti des disputes.
Apprendre à bien communiquer, est-ce le secret pour réussir sa relation
L’écoute et la parole fondent effectivement la communion des époux. Et cela se travaille. Un couple qui, la première année de son mariage, se jetterait dans le boulot, passerait son temps à voir des amis ou bien resterait à la surface de lui-même, perdrait des forces et se mettrait en danger. Les premiers temps de la vie à deux sont essentiels pour mettre en place les habitudes du don de soi à l’autre et de la communication. Un petit caillou dans la chaussure peut rendre une randonnée douloureuse, voire impossible. Si l’un des époux ne prend pas le temps de communiquer avec l’autre pour expliquer ce qui le gêne, ce petit caillou peut faire des dégâts. On imagine facilement ce qui se passera quand arriveront les grosses pierres…
Ne jamais cesser de se parler
Se parler, s’écouter, se raconter des choses, partager ses désirs et ses goûts… Voilà le secret d’une entente amoureuse durable. Pourtant, parce que nous sommes pris par le quotidien, le stress et le manque de temps, communiquer vraiment avec l’autre s’avère souvent plus facile à dire… qu’à faire. Au début, on aime refaire le monde à deux pendant des heures, jusque tard dans la nuit. On partage avec l’autre ses goûts, ses envies, sa vision de la vie, du couple… Mais avec le temps, ces conversations ont tendance à se faire de plus en plus rares, et il devient difficile de trouver ne serait-ce qu’un moment pour se parler dans la course contre la montre que nous menons au quotidien. Qu’on se le dise : le manque de temps est l’ennemi numéro un de bon nombre de couples pressés et fatigués. « Il nourrit la routine », expliquer Yvonne Poncet-Bonissol, psychoclinicienne. Selon elle, « réussir à se parler nécessite de faire preuve de créativité ». Alors pour commencer, pourquoi ne pas instaurer un temps de dialogue au quotidien ? Lors de la promenade au marché le dimanche matin, d’un verre à la sortie du travail, avant d’aller se coucher… A chaque couple d’inventer le rituel qui lui conviendra le mieux.
Mais attention : on peut discuter des heures avec quelqu’un sans lui parler vraiment. Bien souvent, pris dans le quotidien, on finit par parler davantage de ses problèmes de boulot, des factures à payer, que de soi, de l’autre, ou de la relation. Or, communiquer vraiment, c’est aussi se raconter. Evoquer ses goûts, ses envies, ses besoins… L’occasion de surprendre l’autre, d’élaborer ensemble des projets, ô combien importants dans un couple. Et d’éviter, au bout de quelques années, d’avoir à faire ce triste constat que « l’on n’a plus rien à se dire », bien souvent synonyme de l’extinction du sentiment amoureux. Alors, retrouvons le plaisir de nous parler ! « Il faut sans cesse se nourrir, être un agent actif au sein du couple, et ne pas attendre que cela vienne de l’autre, ajoute Yvonne-Poncet Bonissol. Cela implique d’être curieux, de se cultiver, d’avoir des projets, de se sentir vibrer, d’être en constante évolution, de se remettre en question… Et ensuite, de partager tout cela avec l’autre. » Une condition toutefois : dans le couple, l’écoute doit être réciproque. « L’autre doit pouvoir entendre. Il faut que chacun soit attentif aux besoins et aux envies de son compagnon ou de sa compagne, et continue, avec le temps, à être dans l’accueil de l’autre, généreux envers lui. Un couple est à entretenir comme une personne. »
Doser les silences
Qui n’a jamais caressé le rêve d’être compris(e) de son ou sa bien-aimé(e ) sans avoir à prononcer un seul mot ? Et qui n’a jamais été cruellement déçu(e) ? L’amour rend aveugle, dit le proverbe, mais pas devin. « C’est un mythe, une illusion, lance Yvonne Poncet-Bonissol. Tout comme l’idée que l’on n’a pas besoin de se parler parce que l’on s’aime. C’est faux. Il est nécessaire de pouvoir s’exprimer, de se dire… » Et s’il est important, parfois, de savoir être ensemble sans nécessairement se parler, attention à ne pas confondre ces silences complices avec d’autres qui traduiraient davantage de l’ennui, de la rancœur, de la tristesse… Même dans le silence, prenons garde à rester dans l’ouverture, dans le partage avec l’autre. Car de petites phrases comme « Pourquoi tu ne parles pas ? » ou « Dis-moi ce que tu penses » sont probablement le signe d’un silence qui n’est sans doute plus si complice que l’on veut bien le penser…
Parler du couple ensemble
Un état des lieux du couple… Voilà des mots qui en font sans doute frémir plus d’un, à l’idée d’heures interminables passées à se tourmenter, à remettre en cause la relation, voire même, à se disputer. Oui, ces discussions permettent à chacun d’évoquer les choses qui fâchent. Mais avant tout, elles sont, pour le couple, l’occasion de faire un point d’étape. « Bien des couples finissent sous l’emprise l’un de l’autre, estime Yvonne Poncet-Bonissol. Ils ne s’aiment plus mais ils aiment la relation car l’idée d’être en couple est sécurisante. Là, il s’agit, chaque année, lors de l’anniversaire de la rencontre, par exemple, de demander à l’autre s’il est d’accord pour continuer. De faire un point sur son désir, de se souvenir d’émotions du passé, de parler de ses projets… » Un rituel à instaurer également quand le couple va bien. Et un bon moyen de rétablir la communication quand celle-ci est bloquée. « Un échange en panne peut se traduire par de la violence verbale, ou bien du mutisme, du silence. Il s’agit d’éviter l’enlisement d’une situation de monologue digne du théâtre de l’absurde. »
Parler du couple, c’est aussi se poser des questions, à soi-même ou à deux. En voici quelques exemples :
Existe-t-il un décalage entre l’idée que nous nous faisons du couple et sa réalité vécue ?
Savons-nous encore parler d’amour ?
L’humour et le jeu ont-ils leur place dans le couple ?
Accordons-nous du temps à l’autre ?
Avons-nous toujours envie de nous surprendre mutuellement ?
Suis-je capable de rester ce que suis sans renoncer à moi-même ?
Avons-nous envie de continuer un bout de chemin ensemble ?
Tirer parti des disputes
Il est normal pour un couple de se disputer, sain même de s’engueler. C’est la preuve que « le couple est vivant ». Le point commun de la majorité des conflits ? Un problème de communication. « Les scènes de ménage sont là pour remettre les pendules à l’heure, analyse Yvonne Poncet-Bonissol. Elles ont lieu quand le couple n’a pas pu dialoguer avant. Chacun laisse alors exploser ses émotions et ses frustrations. Les conflits sont des régulateurs émotionnels. Des soupapes. On n’en peut plus, on le dit, et le couple se sent mieux. » C’est pour cette raison que souvent, on se lance dans l’affrontement tout en sachant pertinemment que l’on pourrait désamorcer les tensions à temps.
Mais tous les couples n’ont pas la même approche du conflit. Si certains paraissent ne jamais se disputer, d’autres, au contraire, passent leur temps à se chamailler. « Quand on est dans le conflit permanent, on est dans un rapport dominant-dominé, qui va soumettre qui, où l’on va sans cesse tester les limites de l’autre et du lien qui nous unit à lui, commente la psychoclinicienne. A l’inverse, un couple qui ne se dispute jamais est dans un rapport de dépendance. On fuit le conflit. On se suradapte à l’autre. Et comme on a peur de le perdre, on ne dit rien. » Mais taire sa colère a souvent pour conséquence de mettre l’autre à distance. Avec, comme corrolaires, une indifférence grandissante, une baisse du désir…
Exprimer sa colère avant que le désaccord ne dégénère en conflit : voici l’enjeu. Tout en sachant que certaines attitudes ne manqueront pas de faire déraper la situation. Mieux vaut ainsi éviter les vérités absolues (du type « tu ne penses toujours qu’à toi »), les décisions prises en solo (« ce week-end, on va chez ma mère »), d’être dans la critique (on lui préfèrera la suggestion), de fuir l’affrontement… Et, en général, de réagir à chaud. « Il faut parvenir à écouter l’autre, à éviter d’être frontal, à dire sans condamner, renchérit Yvonne Poncet-Bonissol ». Et si parler est trop difficile, pourquoi ne pas écrire ? A l’heure des textos et des mails, il existe mille et une façons de communiquer. Sans oublier la lettre, évidemment !
Le problème, c’est qu’il arrive souvent que chacun campe sur ses positions. « Il y a un moment où il faut mettre son ego de côté. Souvent, c’est celui qui en a le moins qui fait le premier pas. Et qui est généralement aussi celui qui souffre le plus ». A chacun ensuite de reconnaître ses torts. Et d’admettre que le conflit est résolu. Car bien se disputer, c’est aussi apprendre à tourner la page.
Par : Margaux Rambert journaliste et Yvonne Poncet-Bonissol psychoclinicienne.
Bonus Jeu relationnel:
On choisit un moment propice pour se donner rdv et jouer. On peut exhaussédéfinir une heure de fin à l’avance. C’est celui qui exhaussera qui propose le jeu en premier.
L’un dit ce qu’il veut et annonce tout ce qu’il veut faire. C’est important pour être dans un cadre bienveillant et de confiance.
L’autre fait de son mieux pour satisfaire les demandes. Si vraiment c’est trop pour lui, si ça ne lui convient pas, il dit « chaussette! ». Là, une discussion s’ouvre sur ce que l’un recherche et ce dont l’autre a peur. On voit ensuite, si les deux tombent d’accord on reprend et l’action est faite, sinon le demandeur demande autre chose.
Quand le demandeur a eu ce qu’il voulait, que le temps de jeu l’a satisfait, il dit: « je te libère ». Si l’autre au bout d’un moment veut arrêter, il dit « libère-moi ».
Ensuite, on peut débriefer. Plus tard, on inverse les rôles. Voilà pour un jeu équitable, bienveillant, où on apprend à se découvrir et à découvrir l’autre.